DIALOGUE ISLAM ET CHRÉTIENTE

61 la médecine était encore enseignée en araméen. Ibn Bakhtishu (+771), médecin nestorien, appelé par al-Mansour à Bag- dad, fonde un hôpital dont son fils (+801) devient le premier médecin. Un Jacobite, Yuhanna b. Masawayh (777-857), méd- ecin, traducteur et ophtalmologiste, réd- ige le premier traité d’ophtalmologie en arabe (op. cit. p. 276). L’orientaliste allemand Manfred Ullmann, dans son livre «Médecine dans l’Islam», rappelle que tout au long du Moyen Âge, les meilleurs médecins étaient les chrétiens arabes, dont les travaux étai- ent la source de la science médicale de l’époque. Les mathématiques et la géométrie ont également retenu l’attention des tra- ducteurs. Le mérite est dû à Kasta Ibn Luke (+ 912) qui a traduit «Les éléments» d’Euclide, a contribué à la création d’u- ne terminologie mathématique arabe et a également composé une histoire de la pensée grecque et une encyclopédie d’hi- stoire. Yehia Ibn Gharir Gharir Al-Takriti (+1080) s’est distinguée en astronomie avec son ouvrage «Guide to the Science of Astro- nomy», considéré comme un texte clas- sique. Dans le domaine de l’art, les architectes, les maçons, les artistes et même les pri- sonniers, souvent recrutés comme ou- vriers, jouent un rôle fondamental dans la promotion des techniques et des styles. «Les motifs floraux et géométriques, l’a- bondance de reproductions animales, typiques de l’art persan et hellénistiq- ue, continuent à distinguer l’architecture omeyyade et abbasside. Le Dôme du Rocher à Jérusalem, construit entre 687 et 690, est de conception et de style by- zantin ; Bagdad fut construit en 762 par cent mille architectes, ouvriers et artistes syriens et mésopotamiens. Cet immense travail de transmission de la science à travers la langue arabe atteint son apo- gée sous les premiers Abbassides, dont la cour, entièrement iranisée, s’efforce de reproduire les splendeurs du royaume de Cosroe et de la dynastie sassanide. C’était l’époque des traductions (750-850) en- couragées par al-Ma’mum, fondateur en 830 d’une bibliothèque (Bayt al-Hikma) dans laquelle étaient traduites des œuv- res en sanskrit, persan, araméen et grec» (p. 277). Certains des auteurs chrétiens qui ont contribué par leur travail à la création du splendide patrimoine culturel arabe sont également bien connus en Occident : Hu- nayn Ibn Ishaq, considéré comme le plus grand traducteur du grec et du syriaque, dont les livres ont été payés par le poids d’or du calife Ma’amun, Bar Hebraeus, auteur du Chronicon et mort en 1286 et, à notre époque, Gibran Khalil Gibran, au- teur du Prophète, mort en 1931. A côté de ces grands auteurs, il y a cependant un immense groupe d’auteurs, moins con- nus mais tout aussi importants, de livres d’histoire religieuse et civile. 4. Recensement du patrimoine cul- turel Afin de faire connaître les auteurs chrétiens, un comité d’experts, coordon- né par le P. Samir Khalil, qui dirige l’U- niversité Saint-Joseph de Beyrouth, a commencé à cataloguer tout le matériel publié par les chrétiens en arabe. Ce sont des textes de philosophie, de mathémat- iques, de théologie, de botanique publiés dans le cadre d’un empire islamique ima- ginaire, de l’Inde à l’Andalousie. C’est une entreprise très importante qui servira à mettre en valeur et à faire connaître le pa- trimoine culturel arabo-chrétien. Jusqu’à présent, environ 2 000 auteurs et 20 000 œuvres ont été enregistrés, et seule une petite partie d’entre eux a été publiée. Le comité de travail s’est mis d’accord sur certaines définitions. Par «patrimoi- ne», nous entendons l’ensemble de la tra- dition chrétienne, en mettant l’accent sur la période classique (730-1350) ; par «ara- be», nous entendons tout ce que les au- teurs ont produit dans la langue du Coran.

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